« Colorier la carte du monde »… Pourquoi Donald Trump veut-il autant mettre la main sur le Groenland ?

Published 4 hours ago
Source: 20minutes.fr
« Colorier la carte du monde »… Pourquoi Donald Trump veut-il autant mettre la main sur le Groenland ?
<p>Donald Trump n’en démord pas. Le président des <a href="https://www.20minutes.fr/monde/etats-unis/">Etats-Unis</a> veut mettre la main sur le <a href="https://www.20minutes.fr/monde/etats-unis/4192913-20251223-trump-martele-vouloir-groenland-faire-face-chine-russie">Groenland</a> et le fait régulièrement savoir. Les Etats-Unis ont « besoin » du territoire autonome danois pour assurer leur « sécurité nationale » face à la <a href="https://www.20minutes.fr/dossier/chine">Chine</a> et à la <a href="https://www.20minutes.fr/monde/russie/">Russie</a>, a-t-il encore martelé lundi.</p><p>Des propos qui interviennent après l’annonce par le chef d’Etat américain de la nomination d’un envoyé spécial pour ce vaste territoire. Pourquoi une telle obsession pour cette vaste terre recouverte à 80 % de glace ? Economiques, géostratégiques, politiques… Les enjeux sont multiples.</p><h2>Une mine de terres rares… Mais pas forcément rentable</h2><p>Donald Trump l’a encore répété ce mardi. Sa politique du « America First » entend mettre l’accent sur l’économie du pays et la protection, du moins dans le discours, des finances américaines. D’où ses imposants <a href="https://www.20minutes.fr/monde/etats-unis/4178629-20251011-droits-douane-americains-trump-relance-guerre-commerciale-contre-chine">droits de douane</a> concernant toutes sortes de produits en provenance de toutes sortes de pays.</p><p>Et le Groenland est riche en terres rares et « beaucoup d’espaces potentiels de forage » avec la particularité qu’elles ne sont pas, ou très peu exploitées, explique Bertrand Badie, professeur émérite des universités à Sciences Po Paris et spécialiste des relations internationales. Une aubaine pour le président américain qui y voit forcément un trésor à accaparer. D’autant que depuis 2021, <a href="https://www.20minutes.fr/planete/environnement/4011029-20221124-groenland-comment-pays-vert-concilie-protection-environnement-tentation-profit">une loi interdit l’extraction d’uranium</a> au Groenland. Annexer le territoire permettrait au président américain de lever cette interdiction et mettre en application son slogan <a href="https://www.20minutes.fr/monde/etats-unis/4134726-20250121-investiture-donald-trump-veut-dire-drill-baby-drill-slogan-campagne-repete-lors-discours">« Drill, baby, drill »</a> (« Fore, chéri, fore »).</p><p>Une ambition qui fait fi des réalités du terrain. Car si ces terres sont inexploitées, c’est pour de bonnes raisons. Comme rappelé plus haut, le Groenland est recouvert à 80 % de glace, alors « la prospection et l’exploitation seraient très coûteuses, voire pas rentables, en plus d’être extrêmement dangereuses sur un plan environnemental et écologique », soutient Bertrand Badie. L’attitude de Donald Trump prouve alors « une nouvelle fois son appétit et sa désinvolture à l’égard des grands paramètres écologiques », ajoute le professeur.</p><h2>Un cadeau pour les MAGA</h2><p>La planète ? Peu importe tant que Donald Trump séduit sa base électorale et ses alliés de l’extrême droite américaine. « L’administration Trump 2 contrairement au premier mandat s’est radicalisée et rapprochée de l’extrême droite américaine qui est arrivée au pouvoir en janvier avec comme un des objectifs de politique intérieure : instaurer un régime semi-autoritaire », développe Romuald Sciora, chercheur associé à l’Iris et directeur de l’Observatoire politique et géostratégique des États-Unis de l’Iris.</p><p>L’expansion d’un territoire, c’est donc aussi une manière de répondre aux attentes de ses électeurs : « réaffirmer le pouvoir domestique et rapporter des succès sur la scène intérieure », souligne encore le chercheur Romuald Sciora. Dans ce sens, « la prise du Groenland serait un triomphe sans précédent pour les électeurs MAGA [Make America Great Again] car ça serait la première extension du territoire depuis des décennies », abonde-t-il.</p><p>Donald Trump est donc autant agité par une ambition économique que « purement nationaliste d’agrandir le territoire américain et <a href="https://www.20minutes.fr/monde/etats-unis/4132555-20250108-donald-trump-etats-unis-canada-groenland-canal-panama-monde-vu-president-americain-carte">colorier la carte du monde</a> », complète Bertrand Badie. Une manière de reconstruire sa marque en étendant tout le territoire nord américain, comme il l’a déjà montré avec le <a href="https://www.20minutes.fr/monde/etats-unis/4135485-20250125-etats-unis-bienvenue-golfe-amerique-golfe-mexique-rebaptise-administration-trump">Golfe du Mexique rebaptisé « Golfe d’Amérique »</a> ou le <a href="https://www.20minutes.fr/monde/etats-unis/4139899-20250221-etats-unis-canada-jour-peut-etre-bientot-51e-etat-trump-remet-couche">Canada qu’il fantasme en 51e Etat</a>.</p><h2>Un enjeu géostratégique porté par un argument « massue »</h2><p>Rouler sur les alliés historiques des Etats-Unis n’est pas un problème pour le locataire de la Maison-Blanche qui n’hésite pas à mettre en difficulté l’Europe, que ce soit dans le <a href="https://www.20minutes.fr/monde/ukraine/4190649-20251209-guerre-ukraine-trump-allume-zelensky-europeens-hiver-rude">dossier ukrainien</a> ou <a href="https://www.20minutes.fr/economie/4165607-20250728-droits-douane-triomphe-peur-pourquoi-europe-laisse-etats-unis-marcher-dessus">des échanges commerciaux</a>. Là encore, en s’attaquant à un territoire autonome danois, donc membre de l’Otan, Donald Trump dénigre une nouvelle fois les traités internationaux, <a href="https://www.20minutes.fr/monde/russie/4075788-20240212-presidentielle-americaine-2024-donald-trump-peut-enterrer-otan-tous-tous-reelu">dont l’alliance transatlantique</a> et « montre son ascendant sur l’Europe », pointe Bertrand Badie.</p><figure><a href="https://www.20minutes.fr/dossier/donald_trump">Notre dossier sur Donald Trump</a></figure><p>Les Etats-Unis ont une base militaire aérienne, la base spatiale de Pituffik, renforcée en 1951 dans le cadre de l’Otan qui un « point nodal de la défense aérienne de l’espace otanien ainsi qu’un trait d’union entre les continents américain et européen », précise le professeur émérite. Pas suffisant pour Donald Trump qui maintient que le Groenland n’est pas « protégé militairement » et risque des attaques russes ou chinoises.</p><figure> </figure><p>D’où « l’argument massue de la sécurité nationale, un argument vieux comme le monde », rappelle Bertrand Badie. Il permet de justifier à un Etat tout et n’importe quoi tant qu’il agit pour sa propre sécurité, un principe qui organise la compétition et les relations entre les Etats souverains, comme l’avait théorisé Thomas Hobbes au XVIIe siècle. Un argument aussi bien brandi par Adolf Hitler pour envahir les Sudètes, que par Vladimir Poutine pour agresser l’<a href="https://www.20minutes.fr/monde/ukraine/">Ukraine</a> ou par des militaires de plusieurs pays africains pour prendre le pouvoir par la force. « Tout le ponde l’a utilisé, c’est un discours qui ne vaut rien en termes juridiques mais qui sert de joker quand on n’a plus d’argument », analyse encore Bertrand Badie.</p>