Guerre en Ukraine : Avec l’attentat à la voiture piégée contre un général, la Russie sous pression en plein Moscou

<p>Une perte plus politique que stratégique. La mort du <a href="https://www.20minutes.fr/monde/ukraine/4192830-20251222-guerre-ukraine-syrie-tchetchenie-fanil-sarvarov-general-russe-tue-explosion-voiture">général Fanil Sarvarov</a>, chef de la Direction de la formation opérationnelle de l’état-major général des forces armées russes, dans l’explosion de sa voiture ce lundi matin à <a href="https://www.20minutes.fr/monde/moscou/">Moscou</a> soulève des questions. L’attaque n’a pas été revendiquée mais tous les regards, y compris chez les enquêteurs russes, se tournent vers les services spéciaux ukrainiens.</p><p>Ce ne serait pas la première fois qu’ils frappent au cœur de la Russie. Kiev avait revendiqué <a href="https://www.20minutes.fr/monde/ukraine/4129691-20241217-guerre-ukraine-general-igor-kirillov-assassine-kiev-plein-moscou">l’assassinat d’Igor Kirilov</a> en décembre 2024, après l’explosion de sa trottinette, là aussi en plein cœur de Moscou. Un autre général, <a href="https://www.20minutes.fr/monde/ukraine/4150394-20250425-russie-general-tue-explosion-voiture-pres-moscou">Iaroslav Moskalik</a>, avait été tué par « un engin explosif improvisé » près de Moscou en avril 2025. Un assassinat pas revendiqué. D’autres personnalités russes ont par ailleurs été visées ces dernières années, avec toujours, des soupçons portés sur les forces ukrainiennes.</p><p>Ces attaques, qualifiées d’attentat, ne constituent pas un <a href="https://www.20minutes.fr/monde/crimes_de_guerre/">crime de guerre</a>, tient à rappeler Stéphane Audrand, consultant en risques internationaux, car « c’est de la légitime défense qui vise une personnalité militaire, donc une cible légitime, pas des civils ».</p><h2>Une montée en puissance des forces spéciales ukrainiennes</h2><p>Ces modes opératoires montrent que « concrètement, les Ukrainiens ont un réseau à Moscou et en Russie », souligne Michel Goya, ancien colonel des troupes de marine, historien, stratégiste et auteur de <em>L’ours et le renard - Entretiens sur la guerre en Ukraine</em> (Perrin). Car ces cibles, il faut « les détecter, les suivre, connaître leurs habitudes pour poser discrètement l’explosif sous la voiture et enfin avoir la capacité à se dissimuler après l’attentat », développe-t-il encore.</p><p>Infiltrer le personnel ennemi implique de bonnes capacités de renseignements et avoir des personnes capables de mettre à exécution les missions, « des conditions très difficiles à réunir en temps normal », souligne Stéphane Audrand. Mais pour <a href="https://www.20minutes.fr/monde/ukraine/">l’Ukraine</a>, c’est différent. Avec une population souvent russophone, une frontière longue de plus de 1.500 km et le matériel pour avec des écoutes à la fois ukrainiennes et fournies par les Occidentaux, Kiev a rehaussé le niveau de ses forces spéciales depuis 2014.</p><p>Quand la Russie a arraché la <a href="https://www.20minutes.fr/dossier/crimee">Crimée</a> à l’Ukraine, cette dernière a pris conscience de son retard en termes de renseignement face à son voisin. Dans « cette guerre de l’ombre des services spéciaux devenue cruciale, l’Ukraine a réussi à se mettre à niveau des Russes », appuie encore Stéphane Audrand. Elle l’avait déjà prouvé avec son attaque coordonnée de drones, surnommée <a href="https://www.20minutes.fr/monde/ukraine/4156505-20250602-guerre-ukraine-operation-toile-araignee-coup-dur-humiliant-russie">« toile d’araignée »</a>, contre des aérodromes militaires en <a href="https://www.20minutes.fr/monde/russie/">Russie</a>, jusqu’en Sibérie. Ces différents coups durs mettent ainsi en lumière des failles côté russe et un « <a href="https://www.20minutes.fr/monde/russie/4083361-20240326-attentat-moscou-patron-fsb-accuse-services-secrets-ukrainiens-occidentaux">FSB</a> [services de renseignements russes] qui n’a pas fait le job », résume de son côté Michel Goya.</p><h2>Une prise de risque aux retombées limitées sur le front</h2><p>L’assassinat de Fanil Sarvarov dans l’explosion d’une bombe posée sous sa voiture était une opération particulièrement risquée. Si elle a réellement été menée par les services spéciaux, elle met en danger les personnes qui constituent le réseau d’espions sur place puisque l’action peut les exposer aux yeux des autorités. Il y a alors une balance risque/gain à prendre en compte pour les autorités ukrainiennes.</p><figure><a href="https://www.20minutes.fr/monde/ukraine/">Tous nos articles sur la guerre en Ukraine</a></figure><p>Malgré les enjeux, « les gains sont positifs », juge Michel Goya. Ils sont « avant tout politiques et n’auront pas d’importance opérationnelle sur le terrain », ajoute l’historien. Selon lui, ces généraux de l’armée russe sont « remplacés immédiatement et le fait qu’ils peuvent être ainsi visés montre qu’ils ne sont pas forcément protégés donc il ne s’agit pas du top niveau, en revanche, ça permet à l’Ukraine de dire qu’elle est capable de frapper au cœur du pays et faire passer le message : &quot;On est chez vous&quot;. »</p><p>Stéphane Audrand estime cependant que l’attaque peut déstabiliser l’organisation interne voire installer une certaine paranoïa dans les rangs de l’armée russe. « Ça met la pression sur les autres qui peuvent être plus tendus, moins efficaces, sur leurs gardes », précise-t-il. Cela permet aussi de montrer que l’Ukraine se défend, qu’elle n’a pas baissé les bras et qu’elle a « encore des cartes en main » pour peser dans les <a href="https://www.20minutes.fr/monde/ukraine/4192571-20251220-guerre-ukraine-russes-ukrainiens-retrouvent-miami-parler-paix">discussions actuelles autour du conflit</a>.</p>