« En Savoie, on a choisi de ne pas vivre avec la maladie », comment le territoire a éradiqué la dermatose nodulaire

Published 1 hour ago
Source: 20minutes.fr
« En Savoie, on a choisi de ne pas vivre avec la maladie », comment le territoire a éradiqué la dermatose nodulaire
<p>Le 29 juin dernier, la <a href="https://www.20minutes.fr/sante/4166050-20250731-dermatose-nodulaire-plus-50-foyers-detectes-savoie-haute-savoie">Savoie</a> devenait le premier territoire touché par une maladie jusque-là inconnue en France : la <a href="https://www.20minutes.fr/societe/4191751-20251216-dermatose-nodulaire-ennemis-eleveurs-veterinaires-denoncent-menaces">dermatose nodulaire contagieuse</a> (DNC), un virus bovin extrêmement contagieux. Face à cette menace sanitaire, les autorités et le monde agricole ont déclenché une réponse d’urgence, fondée sur le droit européen : abattre tout le troupeau contaminé.</p><p>Résultats ? Depuis l’automne, plus aucun cas n’a été détecté dans les deux Savoie. Une stratégie « radicale », mais jugée « efficace » <a href="https://www.20minutes.fr/societe/4191357-20251214-dermatose-colere-agricole-monte-contre-abattage-vaccination-elargie">alors que d’autres régions sont aujourd’hui confrontées à cette crise</a>.</p><h2>Des vaches parfois asymptomatiques</h2><p>Cédric Laboret, président de la chambre d’agriculture Savoie Mont-Blanc, se souvient encore du premier cas confirmé. « On m’a appelé un dimanche à 15 heures. Ça a été violent… On ne s’y attendait pas. Très vite, il a fallu l’annoncer à l’éleveur. » Car la réponse imposée par la réglementation européenne est ferme : tout le troupeau contaminé doit être abattu, même si une seule vache est infectée. Une décision lourde, incomprise parfois, mais assumée par les professionnels, faute d’alternative.</p><figure><iframe title="Agriculture : Les tensions montent autour de la dermatose nodulaire contagieuse" width="100%" height="100%" src="https://www.ultimedia.com/deliver/generic/iframe/mdtk/01357940/zone/1/src/3suf0uf/showtitle/1/" frameborder="0" scrolling="no" marginwidth="0" marginheight="0" hspace="0" vspace="0" webkitallowfullscreen="true" mozallowfullscreen="true" allowfullscreen="true" allow="autoplay" referrerpolicy="no-referrer-when-downgrade"></iframe></figure><p>« Ce qui est terrible c’est que certaines bêtes ont de la fièvre et des nodules sur la peau, mais d’autres sont totalement asymptomatiques, précise Cédric Laboret. On est incapable de savoir lesquelles sont saines. C’est pour ça que le dépeuplement est nécessaire et qu’on a écarté l’abattage partiel. Si on avait eu une autre solution, on l’aurait prise. Personne n’aime tuer ses animaux. »</p><p>Pour éviter de laisser les éleveurs seuls face à cette épreuve douloureuse, la chambre d’agriculture a déployé son réseau « agir ». Les éleveurs ont donc pu être accompagnés de l’annonce jusqu’aux démarches administratives. « Plus de 80 % des agriculteurs concernés ont fait appel au psychologue de la MSA, insiste-t-il. Pour eux, ce n’est pas anecdotique, ils s’en souviendront toute leur vie. »</p><h2>« On a respecté les consignes »</h2><p>Dès les premiers cas, trois mesures ont été appliquées : interdiction de déplacements, abattage et vaccination massive. « La DNC est une maladie sournoise, avec une longue période d’incubation, rappelle Bernard Mogenet, président de la FDSEA des Savoie. Mais en suivant la réglementation et les retours des spécialistes, qui ont notamment l’expérience des Balkans, on a arrêté la maladie en deux mois [le dernier abattage a eu le 29 août]. Pour y arriver, on a bien compris que les trois piliers devaient fonctionner ensemble. On a respecté les consignes. »</p><p>Mais la mise en place du protocole n’a pas fait l’unanimité au départ. Sur les 59 éleveurs touchés, pour 77 lots, trois blocages ont eu lieu, rapidement levés. « Le sanitaire n’est pas une opinion politique. Chaque éleveur a une responsabilité vis-à-vis des autres. Chez nous, les éleveurs ont fait la part de choses », assure Bernard Mogenet.</p><h2>Une vaccination intensive et le repeuplement</h2><p>En parallèle des restrictions, - levées au bout de 45 jours sans nouveau cas –, la campagne de vaccination a été menée à un rythme soutenu : sept jours sur sept, plus de 250 vétérinaires mobilisés, parfois jusqu’à 1.000 vaches vaccinées par jour, dans les alpages. En trois semaines, 80 % du cheptel était vacciné, assure les professionnels.</p><p>Les chiffres confirment cette efficacité. Dans la première zone réglementée (les Savoie, une partie de l’Ain et de l’Isère), qui regroupe plus de 300.000 bovins, moins de 1.800 animaux ont été abattus, soit 0,7 % du cheptel. « Si on avait laissé faire, avec une mortalité estimée à 10 %, on aurait perdu 30.000 bêtes », souligne Bertrand Mogenet.</p><p>La « force collective » fait aussi partie des raisons de ce « succès ». Toutes les organisations du métier se sont « mises en ordre de marche » pour « le repeuplement ». « On a essayé de retrouver des animaux pour les éleveurs touchés tout en maîtrisant les prix, reprend Cédric Laboret, de la chambre d’agriculture. Aujourd’hui, 90 % d’entre eux sont repartis grâce à un véritable élan de solidarité. L’ensemble du monde agricole a tenu à jouer le jeu pour remercier ces éleveurs. Dans un sens, ils ont abattu leur troupeau pour protéger les leurs. »</p><h2>« Personne ne souhaite vivre ça »</h2><p>Julien Curtil, président des Jeunes agriculteurs 73, se souvient d’une « réalité insoutenable ». « On a vu des vaches qui venaient d’être euthanasiées se disloquer, pourries vivantes », raconte-t-il. Il ajoute : « C’est quelque chose qu’on ne souhaite à personne, même pas à son pire ennemi. Mais cette stratégie a prouvé qu’elle permettait le moins de casse. Ce n’est pour autant qu’on estime que c’est une bonne solution. » « Dans nos Savoie, nos systèmes coopératifs allaient tous dans le même sens, observe-t-il. Ailleurs, ce sont nos opposants qui sont majoritaires, et ont des discours différents. »</p><figure><a href="https://www.20minutes.fr/societe/dermatose-nodulaire/">Notre dossier sur la dermatose nodulaire</a></figure><p>« Le plus important dans l’histoire, c’est le sérieux des éleveurs, reprend encore Cédric Laboret. Collectivement, il faut faire ce choix-là. Nous, dans les Savoie on a fait le choix de dire, &#x27;&#x27;non on ne vivra pas avec la maladie&#x27;&#x27;. » Il espère d<a href="https://www.20minutes.fr/economie/4190930-20251211-abattages-massifs-fermes-assiegees-pourquoi-dermatose-bovine-met-feu-monde-agricole">ésormais que les « collègues du Sud-Ouest feront pareil »</a>. « Parce que la grande crainte des éleveurs c’est d’avoir fait tous ces efforts pour que finalement, on se retrouve à vivre avec la DNC », affirme-t-il.</p><figure> </figure><p>Sentiment partagé par le président des JA 73. « Certains se sentent coupables d’avoir vu la maladie se propager ailleurs, dit-il. Mais ils sont aussi déçus de voir le déchirement du monde agricole. » Il conclut : « Le pire est derrière nous, mais il faut continuer de travailler ensemble, mais aussi avec un <a href="https://www.20minutes.fr/societe/4191511-20251215-direct-dermatose-ministre-agriculture-annie-genevard-attendue-toulouse">plan de vaccination plus large,</a> pour ne pas qu’il revienne. Personne ne veut revivre une deuxième édition. »</p>