Dermatose nodulaire : « Nous ne sommes pas les ennemis des éleveurs », les vétérinaires dénoncent des menaces

<p>« J’espère que la raison va l’emporter ». Jacques Guérin, président du Conseil National de l’Ordre des Vétérinaires (CNOV) conclut ainsi la prise de parole des organisations vétérinaires organisée ce mardi, face à la crise qui secoue le <a href="https://www.20minutes.fr/dossier/agriculture">monde agricole</a>. Des éleveurs, notamment de la Coordination rurale (deuxième syndicat) et de la Confédération paysanne (3e), manifestent actuellement leur colère contre la gestion des cas de <a href="https://www.20minutes.fr/societe/4161090-20250630-elevage-quoi-dermatose-nodulaire-maladie-donne-boutons-vaches">dermatose nodulaire contagieuse</a> (DNC).</p><p>La stratégie gouvernementale prévoit <a href="https://www.20minutes.fr/societe/4191114-20251211-dermatose-agriculteurs-opposent-abattages-ariege-tensions-gendarmes">d’abattre systématiquement le cheptel</a> dès la détection d’un cas de cette épizootie très contagieuse, mais non transmissible à l’homme. En première ligne pour la vaccination, la détection des cas ou pour procéder au « dépeuplement » de foyers de contamination, <a href="https://www.20minutes.fr/dossier/veterinaire">les vétérinaires</a> subissent des « pressions inacceptables », a dénoncé le président du CNOV dès la semaine dernière. Une agressivité encore montée d’un cran ces derniers jours.</p><figure><iframe title="Agriculture : Les tensions montent autour de la dermatose nodulaire contagieuse" width="100%" height="100%" src="https://www.ultimedia.com/deliver/generic/iframe/mdtk/01357940/zone/1/src/3suf0uf/showtitle/1/" frameborder="0" scrolling="no" marginwidth="0" marginheight="0" hspace="0" vspace="0" webkitallowfullscreen="true" mozallowfullscreen="true" allowfullscreen="true" allow="autoplay" referrerpolicy="no-referrer-when-downgrade"></iframe></figure><h2>Menaces de mort, escorte policière</h2><p>« Il y a des photos de nos confrères et consœurs qui circulent sur les réseaux sociaux avec parfois les adresses et les numéros de téléphone, des intimidations verbales, des menaces de s’en prendre aux familles », énumère David Quint, président du SNVEL, l’organisation professionnelle représentative des vétérinaires libéraux.</p><p>« On constate aussi des dégradations de cliniques vétérinaires avec les termes de &quot;collabo&quot;, de &quot;génocide&quot; ou encore &quot;d’assassins&quot;, poursuit le représentant des vétérinaires libéraux. Une rhétorique qui est d’ailleurs dénoncée par les éleveurs eux-mêmes quand elle est utilisée par les associations antispécistes. » Certains vétérinaires doivent être escortés par les forces de l’ordre pour pouvoir travailler. Il évoque notamment le cas de professionnelles dans l’Ariège, forcées de rester enfermées dans leurs voitures jusque tard dans la nuit pour pouvoir intervenir sur les animaux. « Nos confrères et consœurs ne peuvent pas agir en conscience dans des conditions où ils ne se sentent pas en sécurité », martèlent-ils.</p><p>En Dordogne, une enquête pour menaces de mort a été ouverte par le parquet de Bergerac après une plainte de Jean-Yves Gauchot, président de la Fédération des syndicats vétérinaires, qui exerce dans le département. Il a reçu un mail où l’on pouvait notamment lire : « Dans un autre temps, votre tête aurait fini au bout d’un pique. »</p><h2>La seule solution</h2><p>Face aux pressions, les professionnels souhaitent remettre du « scientifique » dans le débat, rappelant l’importance des mesures de lutte et la dangerosité de la dermatose nodulaire pour les animaux. Outre un risque de mortalité, la maladie entraîne aussi des douleurs, des séquelles pour le bovin contaminé, un risque d’infertilité ou encore de perte de rendement en lait.</p><p>« Si nous n’étions pas persuadés qu’actuellement c’est absolument ce qu’il faut faire, on ne défendrait pas cette solution », assure Stéphanie Philizot, présidente de la Société Nationale des Groupements Technique Vétérinaire (SNGTV), organisme indépendant. Vétérinaire rurale depuis vingt-cinq ans, elle rappelle que les vaches peuvent être malades, avec des symptômes, mais aussi infectées de manière subclinique, sans symptômes, ou encore en incubation, un temps long dans le cas de la DNC.</p><figure><a href="https://www.20minutes.fr/societe/dermatose-nodulaire/">Tous nos articles sur la dermatose nodulaire</a></figure><p>« Malheureusement, nous ne savons pas faire la différence entre un animal sain, subclinique ou en incubation, c’est la raison pour laquelle on fait des abattages complets, explique-t-elle. Si on enlève uniquement la vache qui présente des nodules, alors on laisse les autres et la maladie va continuer à faire son œuvre. »</p><h2>« Punching-balls »</h2><p>Pour Jacques Guérin, la situation révèle un questionnement plus profond sur la défense du modèle sanitaire français, celui d’une « lutte collective » au nom de « l’intérêt général ». « Nous sommes solidaires avec les éleveurs touchés par ces abattages, <a href="https://www.20minutes.fr/societe/4182250-20251101-euthanasies-clinique-laissent-gout-amer-comment-bien-accompagner-fin-vie-chat-chien">nous aussi sommes impactés par leur malheur</a> », assure-t-il.</p><figure> </figure><p>En attendant une sortie de crise, les organisations vétérinaires appellent au calme pour préserver le lien entre eux et les agriculteurs. « Les vétérinaires ne sont pas les responsables de la situation. Nous ne sommes pas les ennemis des éleveurs, assure-t-il. L’agressivité est inacceptable, nous ne sommes pas des punching-balls. » Pour lui, les réseaux sociaux amplifient les violences et les pressions à un niveau jamais atteint. « Si la pression et l’hystérisation des débats ne se calment pas, c’est une défiance sur le long terme entre les vétérinaires et les éleveurs qui va s’installer », alerte Jacques Guérin.</p>